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European Court of Human Rights |
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You are here: BAILII >> Databases >> European Court of Human Rights >> GARAND AND OTHERS v. FRANCE - 2474/21 (Art 34 - Victim - Mother-in-law of the deceased who took care of the deceased from a very young age : Preliminary objection partially allowed : Fifth Section) French Text [2025] ECHR 62 (06 March 2025) URL: http://www.bailii.org/eu/cases/ECHR/2025/62.html Cite as: [2025] ECHR 62 |
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CINQUIÈME SECTION
AFFAIRE GARAND ET AUTRES c. FRANCE
(Requête no 2474/21)
ARRÊT
Art 34 • Victime • Belle-mère du défunt ayant pris en charge celui-ci depuis son plus jeune âge, à la suite du décès de sa mère, et contribué à son éducation • Intérêt légitime à saisir la Cour • Frère de la belle-mère du défunt et compagne du demi-frère du défunt ne pouvant se prétendre victimes
Art 2 (matériel) • Recours à la force • Usage d'armes à feu par les forces d'intervention ayant abouti au décès d'un prisonnier en fuite lors de l'opération visant à son interpellation • Circonstances du décès établies au terme d'un processus d'enquête approfondie, sans lacune procédurale • Absence de raison convaincante de s'écarter de l'appréciation factuelles des juge internes • Décision de faire usage des armes à feu pouvant passer pour justifiée et absolument nécessaire au sens de l'art 2 § 2 a) • Absence de défaillance dans la préparation et le contrôle de l'opération d'interpellation
Préparé par le Greffe. Ne lie pas la Cour.
STRASBOURG
6 mars 2025
Cet arrêt deviendra définitif dans les conditions définies à l'article 44 § 2 de la Convention. Il peut subir des retouches de forme.
En l'affaire Garand et autres c. France,
La Cour européenne des droits de l'homme (cinquième section), siégeant en une chambre composée de :
María Elósegui, présidente,
Mattias Guyomar,
Armen Harutyunyan,
Stéphanie Mourou-Vikström,
Andreas Zünd,
Kateřina Šimáčková,
Mykola Gnatovskyy, juges,er
et de Victor Soloveytchik, greffier de section,
Vu :
la requête (no 2474/21) dirigée contre la République française et dont sept ressortissants français (« les requérants ») ont saisi la Cour en vertu de l'article 34 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (« la Convention ») le 17 décembre 2020,
la décision de porter la requête à la connaissance du gouvernement français (« le Gouvernement »),
les observations des parties,
la décision de rejeter la demande d'audience présentée par les requérants,
Après en avoir délibéré en chambre du conseil le 4 février 2025,
Rend l'arrêt que voici, adopté à cette date :
INTRODUCTION
1. L'affaire porte sur le décès d'une personne lors d'une opération d'interpellation menée par une unité d'intervention de la gendarmerie nationale. Les requérants invoquent l'article 2 de la Convention, en son volet matériel.
EN FAIT
2. Les requérants sont les proches du défunt. Leurs identités et leurs liens de parenté avec la victime figurent dans le tableau joint en annexe. Ils sont représentés par Me I. Zribi, avocate à Paris.
3. Le Gouvernement a été représenté par son agent, M. F. Alabrune, directeur des affaires juridiques au ministère de l'Europe et des Affaires étrangères, puis par M. D. Colas, son successeur.
4. Les faits, tels qu'ils sont décrits par les parties et tels qu'ils résultent des documents produits devant la Cour, se présentent de la manière suivante.
I. Les circonstances du décès d'Angelo Garand
A. Éléments de contexte
5. Né en 1979, Angelo Garand fut plusieurs fois condamné et incarcéré.
6. Le 24 septembre 2016, il s'abstint de réintégrer son lieu de détention à l'issue d'une permission de sortie. Une information judiciaire fut ouverte à son encontre du chef d'évasion.
7. Au cours de sa cavale, il fut suspecté d'avoir participé à une série de cambriolages. En outre, deux individus déposèrent plainte à son encontre en l'accusant de leur avoir porté des coups de couteau à Bourgueil le 23 février 2017.
8. Dans le cadre de l'information relative à son évasion, les enquêteurs de la section de recherches de Poitiers et du groupe d'observation et de surveillance d'Orléans parvinrent à géolocaliser son véhicule. Ils constatèrent qu'il était très mobile et qu'il passait rarement deux nuits au même endroit. Ils furent également informés qu'il détenait une arme à feu et qu'il consommait régulièrement des stupéfiants.
9. Le 30 mars 2017, il fut établi qu'Angelo Garand se trouvait au domicile des requérants.
B. La préparation de l'opération d'interpellation
10. Les requérants résidaient dans un ancien corps de ferme, ceint d'un mur de pierre, sur le territoire de la commune de Seur, au sud de Blois. Celui‑ci est composé d'un bâtiment principal et de deux petites dépendances. À la date des faits, cinq caravanes et un fourgon y étaient stationnés.
11. Compte tenu des antécédents d'Angelo Garand, de sa dangerosité et de sa récente mise en cause dans des faits de violences avec arme (paragraphes 5, 7 et 8 ci-dessus), l'opération d'interpellation fut confiée à l'antenne du Groupe d'intervention de la gendarmerie nationale de Tours (« l'antenne du GIGN »).
12. Quinze de ses agents furent dépêchés sur place dès qu'Angelo Garand fut localisé. Ils étaient, pour la plupart, en tenue d'intervention et lourdement équipés.
13. Un briefing fut organisé à leur arrivée à Blois, vers 11 h 30. Les membres de l'antenne du GIGN furent informés qu'Angelo Garand était susceptible d'être armé et sous l'emprise de stupéfiants. Des clichés du fugitif et ses antécédents leur furent communiqués. Un plan d'intervention fut établi à l'aide de prises de vues satellitaires.
C. Le déroulement de l'opération
14. Vers 13 heures, les agents de l'antenne du GIGN arrivèrent sur les lieux au moyen d'un véhicule banalisé. Ils interpellèrent le fils d'Angelo Garand devant l'entrée du corps de ferme. Celui-ci eu toutefois le temps d'avertir son père.
15. Les agents investirent la propriété et se séparèrent pour fouiller les bâtiments, les caravanes et le véhicule se trouvant dans son enceinte. Ils interpellèrent les proches d'Angelo Garand présents sur les lieux.
16. Après l'inspection des autres locaux, les adjudants F.D. et A.B. pénétrèrent dans la dernière dépendance qui restait à visiter. Il s'agissait d'une remise d'environ 5 m 40 sur 4 m 20, ne comportant qu'une entrée, encombrée d'objets divers et dépourvue d'éclairage.
17. F.D. découvrit Angelo Garand, caché sous un sac. Il annonça sa qualité (« Gendarmerie, gendarmerie ! ») et le somma de se lever et de mettre ses mains en évidence.
18. Le gendarme J.B. et l'adjudant R.S. les rejoignirent dans la remise.
19. Selon les déclarations ultérieurement faites par F.D., A.B., J.B. et R.S. (paragraphes 38 à 43 ci-dessous), la scène se poursuivit comme il suit.
20. F.D. tenta d'abord d'appréhender Angelo Garand, mais celui-ci résista. Il aperçut alors un couteau dans la main du fugitif, ce qu'il signala à ses camarades (« Couteau, couteau ! »). Angelo Garand se montra alors très menaçant et fit de grands gestes de balayage devant lui avec son arme.
21. L'adjudant B.D. entra dans la pièce à cet instant.
22. R.S. et F.D. effectuèrent, l'un après l'autre, un tir de pistolet à impulsion électrique. Toutefois, Angelo Garand parvint à arracher les fils le reliant à leurs armes à l'aide de sa main gauche, faisant cesser leur décharge.
23. Il se précipita ensuite en direction de F.D., le couteau à la main. Selon les déclarations d'A.B et de F.D., il tenta de porter à ce dernier un coup de couteau au niveau de la gorge. A.B. tira alors à plusieurs reprises sur Angelo Garand à l'aide de son arme de poing (un pistolet semi-automatique de calibre 9 mm). Il reçut ensuite un violent coup au niveau de la mâchoire, dont il ne put expliquer la provenance avec certitude et qui le fit tomber à la renverse. Au sol, il effectua une seconde série de tirs après avoir constaté qu'Angelo Garand restait agressif. Puis, il perdit connaissance.
24. Constatant qu'Angelo Garand continuait sa progression en menaçant ses collègues, B.D. procéda à un dernier tir avec son arme de poing, ce qui eut pour effet de le stopper.
25. Angelo Garand chuta au sol. F.D. et B.D. procédèrent d'abord à son menottage, avant de le désentraver au vu de ses blessures. Des gendarmes tentèrent de lui apporter les premiers secours, mais ne purent trouver son pouls et constatèrent qu'il ne respirait plus.
26. Inerte, A.B. fut évacué de la remise par certains de ses camarades. Il reprit progressivement ses esprits à l'extérieur.
27. Les secours furent prévenus à 13 h 08, immédiatement après les faits. Un médecin du service d'aide médicale urgente (SAMU) du centre hospitalier de Blois se rendit sur place et constata le décès d'Angelo Garand.
II. Les investigations relatives au décès d'Angelo Garand
A. L'enquête de flagrance
28. Le procureur de la République de Blois se transporta sur place. À 14 h 30, il ouvrit une enquête du chef de violences volontaires ayant entraîné la mort sans intention de la donner par personnes dépositaires de l'autorité publique et confia les investigations au bureau des enquêtes judiciaires de l'Inspection générale de la gendarmerie nationale (« l'IGGN »).
29. À 15 h 45, les deux agents ayant tiré furent placés en garde à vue. Les tests d'alcoolémie et de dépistage de l'usage de stupéfiants dont ils firent l'objet s'avérèrent négatifs.
1. Constatations et examens techniques
30. Des constatations et des prises de vues furent effectuées sur les lieux. Une série d'examens techniques fut par ailleurs requise.
31. L'examen des armes de poing utilisées par les agents permit de déterminer qu'A.B. avait fait feu à sept reprises, tandis que B.D. avait procédé à un tir unique.
32. Dans la remise, huit étuis de munitions et deux couteaux - dont un couteau pliant semblable à celui appartenant à Angelo Garand - furent découverts.
33. L'autopsie du corps du défunt et les examens balistiques qui y furent associés permirent d'abord de constater la présence de trois ardillons fichés dans sa peau, ce qui était compatible avec deux tirs de pistolet à impulsion électrique. Ils permirent ensuite d'établir qu'Angelo Garand avait été atteint par cinq tirs de munitions de calibre 9 mm au niveau du thorax. Il était décédé d'une hémorragie massive directement imputable de ces tirs. Quatre projectiles furent retrouvés dans son organisme. Un dernier fut retrouvé entre sa peau et l'élastique de son pantalon, près d'un orifice de sortie.
34. Des examens balistiques complémentaires permirent de confirmer que sept des étuis de munitions retrouvés sur les lieux avaient été tirés à l'aide de l'arme d'A.B. et que le dernier avait été tiré à l'aide de l'arme de B.D. L'analyse des projectiles retrouvés lors de l'autopsie permit de considérer qu'ils avaient très probablement été tirés avec l'arme d'A.B. Il fut par ailleurs évalué que l'arme de ce dernier se trouvait à environ 50 cm de la cible lors d'un des tirs effectués à hauteur du pectoral droit de la victime.
35. L'examen des pistolets à impulsion électrique de F.D. et R.S. permit de confirmer que tous deux avait été armés et déclenchés à 13 h 05 le jour des faits, à quelques secondes d'intervalle, l'horodatage étant approximatif.
36. Des analyses toxicologiques révélèrent qu'Angelo Garand était sous forte imprégnation de cannabis au moment des faits. Des traces d'une consommation plus ancienne de cocaïne et de buprénorphine furent également identifiées.
37. Par ailleurs, un révolver hors d'usage, un pistolet à billes et une bombe lacrymogène furent retrouvés dans le véhicule utilisé par Angelo Garand.
2. Auditions des agents mis en cause
38. Au cours de leur garde à vue, les agents ayant procédé aux tirs furent entendus à plusieurs reprises. La mesure fut prolongée.
39. Tous deux expliquèrent qu'ils avaient dû tirer pour protéger la vie de F.D., l'action s'étant déroulée en un bref instant. Ils estimèrent avoir agi en état de légitime défense.
40. A.B. indiqua que la pièce était sombre et que la scène était principalement éclairée par les organes lumineux et de visées des armes des gendarmes. Il déclara avoir fait feu alors qu'Angelo Garand mettait en danger F.D., en faisant de grands gestes avec son couteau près de son cou, et après deux tirs de pistolet avec impulsion électrique restés infructueux. Il expliqua avoir commencé à tirer debout, puis être tombé après avoir reçu un choc au niveau du menton. Il avait continué à tirer au sol avant de s'évanouir. Il ne s'était rendu compte du nombre de tirs effectués qu'après coup. En huit années d'affectation dans des unités d'intervention, il n'avait jamais été confronté à une situation d'une telle intensité. Il avait déjà été amené à tirer en intervention, mais uniquement avec des munitions non létales.
41. B.D. reconnut qu'il n'avait pas vu le couteau brandi par Angelo Garand, mais expliqua qu'il avait entendu l'avertissement d'un de ses camarades (« Couteau ! ») et qu'il avait perçu des mouvements de recul défensifs de leur part. Il déclara avoir tiré après avoir constaté qu'A.B. avait été violemment projeté en arrière et alors qu'Angelo Garand continuait à progresser en direction de ses camarades. Il précisa avoir utilisé la seule fenêtre de tir utile pour les protéger. En fonction à l'antenne du GIGN depuis moins d'un an, il n'avait jusqu'alors jamais ouvert le feu en opération.
42. A.B. et B.D. firent par ailleurs valoir qu'ils avaient bénéficié d'un haut degré de formation au maniement des armes à feu et aux techniques d'intervention. Ils avaient pratiqué des exercices très réguliers et avaient en outre reçu une formation sur le régime juridique de l'emploi des armes à feu.
3. Auditions des témoins directs et des proches du défunt
43. Les trois autres gendarmes présents dans la réserve furent entendus séparément. Ils confirmèrent le récit de leurs collègues gardés à vue.
44. Les proches d'Angelo Garand furent entendus après de multiples tractations visant à les inciter à déposer. Ils indiquèrent n'avoir pas été témoins directs des faits, mais avoir entendu plusieurs coups de feu, suivi d'une injonction à « cesser le feu » et à lancer une « grenade ».
45. Le fils du défunt indiqua que son père ne se séparait jamais de son couteau et qu'il en faisait facilement usage en cas de conflit. Il confirma que son père avait récemment porté des coups de couteau à deux individus (paragraphe 7 ci-dessus) et qu'il consommait des stupéfiants. Il précisa que son père était déterminé à rester en liberté.
4. Reconstitution
46. Le 31 mars 2017, une mise en situation fut réalisée en présence des gendarmes impliqués et des techniciens ayant effectué les examens balistiques. Ces derniers considèrent que les déclarations respectives des gendarmes étaient compatibles avec la mise en situation et avec les conclusions de l'autopsie. Les trajectoires de tir décrites par A.B. permirent de découvrir une atteinte au plafond pouvant correspondre à un stigmate de tir. Il fut par ailleurs estimé que la bouche du canon de l'arme de B.D. se trouvait à environ 70 cm du corps du défunt lors de son tir.
B. L'information judiciaire
47. Le 7 avril 2017, une information judiciaire fut ouverte du chef de violence volontaire ayant entraîné la mort sans intention de la donner.
48. Les requérants se constituèrent partie civile.
1. Poursuite des investigations
49. Des investigations complémentaires furent menées sur commission rogatoire et plusieurs expertises furent ordonnées.
50. Une expertise génétique permit de déterminer que le profil génétique relevé sur le manche du couteau pliant retrouvé lors des constatations (paragraphe 32 ci‑dessus) correspondait à celui du défunt.
51. Tous les gendarmes ayant participé à l'opération furent entendus.
52. Les enregistrements des communications entre le médecin ayant constaté le décès (paragraphe 27 ci-dessus) et son collègue assurant la régulation du SAMU furent saisis et retranscrits. Lors d'une première communication, le docteur C. annonça le décès d'Angelo Garand et signala que la situation sur place était très tendue. Dans une seconde communication, passée vers 15 heures, le docteur C. informa son collègue de l'ouverture d'une enquête. S'ensuivit l'échange suivant :
« Médecin régulateur : Ah bon ?... Pourquoi ils trouvent ça suspect ?
Docteur C. : Parce que le gars n'était pas armé... je pense, je sais pas.
Médecin régulateur : Ah bon d'accord !
Docteur C. : Je ne sais pas, donc voilà.... (...) »
53. Le 16 juin 2017, le juge d'instruction entendit le premier et la troisième requérante en qualité de parties civiles.
54. Le 25 septembre 2017, il se rendit sur les lieux des faits.
55. Le même jour, il interrogea les deux agents ayant effectué les tirs, qui confirmèrent leurs précédentes déclarations et furent mis en examen du chef de violences volontaires ayant entraîné la mort sans intention de la donner.
56. Le 12 janvier 2018, le juge d'instruction réentendit F.D., R.S. et J.B. en qualité de témoins. Tous trois réitérèrent leur version des faits.
57. Le 5 avril 2018, il interrogea le docteur C. au sujet des échanges qu'il avait eu avec le régulateur du SAMU le jour des faits (paragraphe 52 ci‑dessus), en présence de l'avocat des parties civiles. En dépit de questions répétées, le médecin ne put expliquer pourquoi il avait indiqué que « le gars n'était pas armé ». Il souligna que cette phrase avait été prononcée en raison du caractère inhabituel de la situation et expliqua que le procureur de la République l'avait invité à faire preuve de discrétion, compte tenu du contexte et des tensions qui étaient susceptibles de s'ensuivre avec la communauté des gens du voyage.
2. Clôture de l'information
a) Le non-lieu prononcé par le juge d'instruction
58. Par une ordonnance du 10 octobre 2018, le juge d'instruction ordonna le non-lieu au bénéfice d'A.B et de B.D.
59. Il releva que le décès d'Angelo Garand était imputable aux tirs volontairement effectués par ces agents, mais considéra que ceux-ci n'avaient pas été animés par une intention homicide. Il tint pour établi qu'Angelo Garand avait opposé une particulière résistance à son interpellation, en brandissant son couteau – retrouvé dans la remise, dans le prolongement de son bras droit, et dont il ne se séparait jamais – de façon menaçante. Il releva que trois des gendarmes présents dans la remise avaient chuté lors de l'altercation, et que la veine jugulaire de l'un d'entre eux se trouvait à la portée de l'arme du fugitif. Il considéra que la scène avait été décrite de façon concordante par les agents concernés, alors que leurs déclarations avaient été recueillies peu de temps après la fin de l'opération et sans possibilité de collusion. Il nota en outre que les gendarmes avaient ouvert le feu après deux tirs au pistolet à impulsion électrique, qui s'étaient avérés inefficaces. Il souligna que les faits étaient survenus dans un cabanon exigu, mal éclairé et encombré d'objets, de sorte que les conditions d'interpellation étaient particulièrement difficiles et que les agents se trouvaient à proximité immédiate d'Angelo Garand. Il nota que celui-ci avait eu un comportement incontrôlable et estima qu'A.B. et B.D. avaient fait usage de leur arme de poing à un moment où il leur était apparu que la vie de leurs collègues était directement menacée. Le juge d'instruction en conclut que le recours à la force meurtrière avait été absolument nécessaire et que ces agents avaient agi en état de légitime défense d'autrui.
b) La confirmation du non-lieu par la chambre de l'instruction
60. Les requérants interjetèrent appel de l'ordonnance de non-lieu.
61. Par un arrêt du 7 février 2019, la chambre de l'instruction de la cour d'appel d'Orléans confirma cette décision, en considérant, par substitution de motifs, que les agents avaient fait usage de leur arme dans les conditions prévues par l'article L. 435-1 du code de la sécurité intérieure et qu'ils devaient donc être exonérés de responsabilité pénale en application de l'article 122-4 du code pénal. Cet arrêt fut motivé dans les termes suivants :
« Attendu qu'il n'est pas contesté ni contestable que [A.B.] et [B.D.] (...) ont agi dans l'exercice de leurs fonctions et revêtus de leur uniforme ou des insignes extérieurs et apparents de leur qualité ;
Qu'il est établi que ces militaires (...) sont particulièrement entraînés au maniement de leurs armes et sont compétents pour gérer des situations complexes ; que c'est la raison pour laquelle le GIGN a été appelé le 30 mars 2017 pour interpeller Angelo Garand, évadé (...) présenté comme étant potentiellement armé et donc dangereux et sous l'emprise de drogues dures (...) ;
Qu'il ressort de ses nombreux antécédents judiciaires la démonstration du caractère violent et dangereux de l'intéressé, lequel, à travers notamment deux affaires, avait cherché à percuter un véhicule de gendarmerie alors qu'il tentait d'échapper à un contrôle routier et avait jeté des bouteilles de gaz aux gendarmes pour faciliter sa fuite ;
(...)
Attendu qu'il résulte des témoignages concordants des militaires engagés, qu'à leur arrivée sur les lieux de l'interpellation, Angelo Garand s'était caché dans une dépendance de petite superficie (...) où régnait un grand désordre, attesté par les photographies et les constatations effectuées ; que lors de leur pénétration dans celle‑ci, les gendarmes, après avoir pris soin de se signaler, ont immédiatement constaté qu'Angelo Garand n'entendait nullement se soumettre à son arrestation ;
Que les auditions des deux mis en examen relatifs au caractère agressif et menaçant d'Angelo Garand (...) sont corroborées par celles de leurs collègues présents dans la dépendance ; qu'il ressort également de la déposition de [R.L., le directeur d'enquête de la section de recherches de Poitiers] que du portail, il avait entendu qu'il y avait une lutte à l'intérieur de la remise et que ça criait ;
Qu'ainsi [R.S.] a pu notamment déclarer qu'Angelo Garand ne "veut pas coopérer" qu'il est "en position agressive", "qu'il se jette sur mes camarades, face à lui, couteau en avant" et qui "malgré les tirs, continue d'avancer" ; qu'il a précisé avoir nettement distingué que Angelo Garand (...) était armé, dans sa main droite, d'un couteau (...), couteau dont il ne se séparait jamais d'après les déclarations de son fils, Charlie ; que la possession de cette arme par l'intéressé a été corroborée par sa présence à ses côtés lors des constations des enquêteurs après son décès et par l'existence de son ADN sur le manche, ainsi que par les déclarations [de J.B.], lequel a indiqué avoir aperçu sa cible surgir de sa cachette dans la dépendance encombrée où il faisait noir et qu'il l'avait vu sortir un couteau de l'arrière droit de son pantalon et qu'il avait annoncé, ainsi que d'autres collègues "couteau" ;
Qu'[en] outre (...), il ressort de la déposition du gendarme [F.D.], dont rien ne permet de démontrer que les déclarations sont mensongères, que le fugitif l'a exhibé de manière dangereuse ; qu'il a ainsi précisé dans sa déposition qu'Angelo Garand avait foncé sur lui, le couteau en l'air en direction de son cou prêt à lui asséner un coup de sorte qu'il avait fini par tomber au sol avec l'individu, chute concomitante à des coups de feu qui étaient tirés ;
Que s'il est exact que les militaires du GIGN sont lourdement équipés, en revanche ils ne sont pas protégés au niveau du cou de sorte que le comportement agressif d'Angelo Garand (...) n'a pu que mettre en danger l'intégrité physique voire la vie des militaires se trouvant à proximité, en particulier celle [F.D.] (...) de sorte que [A.B.], non loin des deux protagonistes, a été amené à faire usage de son arme, au regard de la situation de danger avérée ;
Qu'il y a lieu de retenir que le premier tir d'[A.B.] n'a eu aucun effet dissuasif ; qu'en effet, suite à la chute de [F.D.], Angelo Garand a continué sa progression menaçante et réellement dangereuse et qu'un autre militaire, en l'espèce [A.B.] a chuté alors qu'un de ses collègues a crié "touché" ; que c'est donc à juste titre que [B.D.] a pu légitimement croire à l'existence de blessures de son collègue et donc à une situation de péril imminent et réel le conduisant, après analyse de la situation, à faire tout aussi légitimement usage de son arme (...) ;
Attendu que face à l'absence de toute autre alternative possible (...) face au comportement excédé d'Angelo Garand, lequel était "véhément", "en rage" et impossible à maîtriser, l'expertise toxicologique pratiquée sur lui ayant en outre relevé la présence de THC en quantité importante et de la cocaïne dans la bile (...), seule l'usage d'armes à feu par [A.B.] et [B.D.] s'est révélé de nature à maîtriser le fugitif et à protéger leur intégrité physique (...) ainsi que celle de leurs collègues (...) ;
Attendu qu'il est établi que l'usage des armes par les deux mis en examen a été décidé après des injonctions des gendarmes (...), après une tentative de maîtrise à mains nues et après l'usage du pistolet à impulsion électrique qui s'est révélé inefficace pour pouvoir maîtriser effectivement Angelo Garand dont l'agressivité et l'excitation (...) n'ont cessé de s'amplifier (...) ;
Que force est de constater que la réponse des gendarmes, face à un danger réel, a été graduée ;
Attendu en effet que l'usage des armes à feu par les deux militaires de la gendarmerie ([A.B.] et [N.D.]) a été strictement proportionnée au danger de mort ou d'atteinte physique grave encouru par ces derniers et leurs collègues ;
(...)
Que [J.B.] (...) a ainsi précisé qu'Angelo Garand avait fléchi un peu après les coups de taser mais était parvenu à arracher les ardillons et s'était rué sur les militaires, armé de son couteau, avec des gestes circulaires ; que les militaires ont reculé, pour éviter que [F.D.], le plus proche, se prenne le couteau dans la gorge et qu'en reculant, il avait entendu une ouverture de feu avec des tirs en continu mais ne parvenait pas à préciser qui avait tiré ; qu'il a indiqué qu'à ce moment précis, il avait chuté au sol en butant sur un objet tandis qu'Angelo Garand avait continué à avancer couteau à la main et que les militaires étaient tous tombés et qu'il avait aperçu [F.D.] et [A.B.] au sol, ce dernier inerte et qu'Angelo Garand s'y trouvait également au milieu d'eux ;
Attendu qu'il y a lieu de rappeler que les experts en balistique ont conclu que le tir ayant touché le pectoral droit de la victime a été estimé à une distance approchant 50 centimètres de sorte qu'il y a lieu d'en conclure qu'[A.B.] a été en prise directe avec Angelo Garand (...) ;
Attendu que si une des parties civiles indique que les militaires de la gendarmerie auraient du quitter le dépendance et attendre la sortie d'Angelo Garand, alors qu'il n'y avait qu'un point d'entrée et de sortie, cet argument n'est pas pertinent alors que l'appréciation de la conduite à tenir, au regard de la jurisprudence, doit être évaluée au moment de la situation qui se présentait aux gendarmes, lesquels avaient pour mission d'interpeller Angelo Garand et non pas de rester dans une position attentiste pour laisser le champ libre à une personne décrite comme étant dangereuse et qui de fait l'était véritablement comme précédemment exposé ;
Attendu que si huit tirs ont été effectués, [A.B.] confirmant pour sa part avoir tiré sept cartouches (...), il y a lieu de faire observer que les deux militaires de la gendarmerie ont tiré alors qu'ils se trouvaient dans la pénombre dans une pièce exigüe et encombrée et n'ont poursuivi qu'un but, celui de maîtriser Angelo Garand, en furie, et par là même de protéger leur vie et celle de leurs collègues au regard du danger manifeste auquel ils étaient exposés et ce d'autant que l'agressivité de la victime avait redoublé au fur et à mesure des évènements et que les moyens employés tels que décrits supra pour le neutraliser avaient échoué ; que dès lors aucune absence de proportionnalité ne saurait être valablement soutenue au regard du contexte ci-dessus décrit (...) ; que la cour considère que le recours à la force meurtrière par les deux gendarmes, qui n'avaient aucune intention homicide, a été absolument nécessaire face au risque réel d'atteinte à leur intégrité physique et à celles de leurs collègues présents après qu'ils aient gradué leur riposte face à l'engagement physique d'Angelo Garand et son attaque illégale, lequel a exhibé son couteau très rapidement et n'a pas hésité à foncer sur les militaires, dont plusieurs sont tombés à terre et l'un dont la jugulaire se trouvait à portée du couteau du fugitif ;
Que l'absence de sommation au moment des tirs ne contrevient pas aux dispositions de l'article L. 435-1, 1 o du code de la sécurité intérieure précité qui n'impose pas une telle sommation en cas de menace directe de la vie ou de l'intégrité physique des agents intervenants ;
Attendu que si l'avocat d'une partie civile invoque la modification de la scène avant l'arrivée des enquêteurs, la Cour fait observer que la modification de celle-ci n'a pas eu pour but de "maquiller la réalité" puisqu'il résulte du procès-verbal de constatations que :
"L'état des lieux n'a été que très peu modifié. [R.L.] nous informe qu'il est entré dans l'annexe dans un premier temps pour se porter à la hauteur du corps et n'a décelé aucun pouls sur le défunt. Il accompagne par la suite le médecin urgentiste qui en pénétrant dans l'annexe renverse le carton de pommes de terre visible à l'entrée. Le docteur [C.] constate le décès. Aucun soin de réanimation n'a été réalisé. L'annexe est ensuite gardée par les militaires du PSIG de BLOIS. La famille présente sur le site est isolée."
Attendu que si l'avocat des autres parties civiles invoque l'existence de consignes voire un climat de pression imposé aux différents intervenants (...), faisant allusion notamment aux procès-verbaux de transcription de communication du médecin présent sur les lieux avec le SMUR lequel a évoqué que "le gars n'est pas armé" et qu'il fallait "une discrétion totale", il ressort de l'audition du médecin étant intervenu sur les lieux que ses propos ont été prononcés du fait du contexte inhabituel et qu'il n'était pas habitué à des situations pareilles ; qu'il a indiqué que la demande de discrétion quant à son intervention se justifiait au regard de la tension qui régnait sur les lieux et de la volonté du procureur de la République d'apaiser la situation ; qu'il ne saurait donc être tiré des conséquences erronées de ces propos face à la loyauté de l'enquête et des éléments objectifs corroborant les déclarations des gendarmes ;
(...)
Attendu en conséquence, au vu de tout ce qui précède, si dramatique que soit le décès d'Angelo Garand et la douleur de sa famille, il ressort que [A.B.] et [B.D.] ont agi dans le cadre et le respect de la loi en faisant usage de leurs armes (...) ; qu'il convient, dès lors, de faire application de l'article 122-4 du code pénal pour exclure la responsabilité pénale des mis en examen dans les faits commis ; »
c) Le rejet du pourvoi en cassation formé par les requérants
62. Les requérants se pourvurent en cassation contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel d'Orléans du 7 février 2019.
63. Le 17 juin 2020, leurs pourvois en cassation furent déclarés non admis.
LE CADRE JURIDIQUE INTERNE
64. Aux termes du premier alinéa de l'article 122-4 du code pénal :
« N'est pas pénalement responsable la personne qui accomplit un acte prescrit ou autorisé par des dispositions législatives ou réglementaires. »
65. L'article L. 435-1 du code de la sécurité intérieure encadre l'usage des armes par les forces de l'ordre. Les dispositions pertinentes de cet article, dans leur version issue de la loi no 2017-258 du 28 février 2017, sont les suivantes :
« Dans l'exercice de leurs fonctions et revêtus de leur uniforme ou des insignes extérieurs et apparents de leur qualité, les agents de la police nationale et les militaires de la gendarmerie nationale peuvent, outre les cas mentionnés à l'article L. 211-9, faire usage de leurs armes en cas d'absolue nécessité et de manière strictement proportionnée :
1o Lorsque des atteintes à la vie ou à l'intégrité physique sont portées contre eux ou contre autrui ou lorsque des personnes armées menacent leur vie ou leur intégrité physique ou celles d'autrui ;
(...) »
EN DROIT
I. SUR LA VIOLATION ALLÉGUÉE DE L'ARTICLE 2 DE LA CONVENTION
66. Les requérants soutiennent que le recours à la force meurtrière effectué par les gendarmes est contraire à l'article 2 de la Convention, aux termes duquel :
« 1. Le droit de toute personne à la vie est protégé par la loi. La mort ne peut être infligée à quiconque intentionnellement, sauf en exécution d'une sentence capitale prononcée par un tribunal au cas où le délit est puni de cette peine par la loi.
2. La mort n'est pas considérée comme infligée en violation de cet article dans les cas où elle résulterait d'un recours à la force rendu absolument nécessaire :
a) pour assurer la défense de toute personne contre la violence illégale ;
b) pour effectuer une arrestation régulière ou pour empêcher l'évasion d'une personne régulièrement détenue ;
(...). »
A. Sur la recevabilité
1. Thèses des parties
67. Le Gouvernement conteste la qualité pour agir des deuxième, sixième et septième requérants, qui sont respectivement la belle-mère du défunt, le frère de celle-ci et la compagne du demi-frère du défunt. Il soutient qu'ils n'ont pas l'intérêt légitime requis pour se dire victimes d'une violation de la Convention. Il fait valoir que les intéressés n'ont pas de lien de parenté avec Angelo Garand au regard du droit interne et que la deuxième requérante n'est pas liée au défunt par une adoption ou par une délégation d'autorité parentale.
68. Les trois requérants concernés soutiennent au contraire qu'ils étaient étroitement liés au défunt. Ils se prévalent de liens familiaux de fait. La deuxième requérante fait particulièrement valoir qu'elle a élevé Angelo Garand à la suite du décès de sa mère. Ils ajoutent qu'ils étaient présents sur les lieux le jour du drame, et qu'ils se sont constitués parties civiles devant les juridictions internes.
2. Appréciation de la Cour
a) Principes généraux
69. La Cour rappelle que la notion de « victime », au sens de l'article 34 de la Convention, doit être interprétée de façon autonome et indépendante de notions de droit interne telles que celles concernant l'intérêt ou la qualité pour agir (Gorraiz Lizarraga et autres c. Espagne, no 62543/00, § 35, CEDH 2004-III, et Communauté genevoise d'action syndicale (CGAS) c. Suisse [GC], no 21881/20, § 105, 27 novembre 2023).
70. Une requête ne peut, en principe, être présentée que par des personnes vivantes ou en leur nom. Si la victime alléguée d'une violation de l'article 2 de la Convention est décédée avant l'introduction de la requête, une personne ayant l'intérêt légitime requis en tant que proche du défunt peut saisir la Cour de griefs liés à son décès (Varnava et autres c. Turquie [GC], nos 16064/90 et 8 autres, § 111, CEDH 2009, et Mortier c. Belgique, no 78017/17, § 112, 4 octobre 2022). Cette exception procédurale se justifie par la nécessité d'assurer une protection effective de l'une des dispositions les plus fondamentales du système de la Convention (Fairfield c. Royaume‑Uni (déc.), no 24790/04, CEDH 2005-V).
71. Selon une jurisprudence constante, un parent, un frère, une sœur, un neveu ou une nièce d'une personne dont il est allégué que le décès engage la responsabilité de l'État défendeur peuvent se prétendre victimes d'une violation de l'article 2 de façon inconditionnelle (Fabris et Parziale c. Italie, no 41603/13, § 38, 19 mars 2020). En revanche, la qualité de victime n'est pas nécessairement reconnue aux personnes ayant un lien familial plus distant avec la victime alléguée (voir, par exemple, pour un lien de parenté au quatrième degré, Belkıza Kaya et autres c. Turquie, nos 33420/96 et 36206/97, § 46, 22 novembre 2005).
72. Dans l'affaire Velikova c. Bulgarie ((déc.), no 41488/98, CEDH 1999 V (extraits)), la Cour a reconnu que la concubine du défunt avait qualité pour agir, dans la mesure où le couple en concubinage stable constitue une famille au sens de l'article 8 et où rien n'incitait à distinguer la situation de la requérante de celle d'une épouse.
b) Application en l'espèce
73. La deuxième requérante est la belle-mère du défunt. Devant la Cour, elle justifie du fait qu'elle a pris en charge Angelo Garand dès le plus jeune âge, à la suite du décès de sa mère, et qu'elle a contribué à son éducation. Or, une telle relation de fait relève du domaine de la vie familiale au sens de l'article 8 (Honner c. France, no 19511/16, § 50, 12 novembre 2020, Callamand c. France, no 2338/20, §§ 20-21, 7 avril 2022, et Vinškovský c. République tchèque (déc.), no 59252/19, § 40, 5 septembre 2023). Il n'y a donc pas lieu d'exclure la deuxième requérante du cercle des proches du défunt ayant un intérêt légitime à saisir la Cour d'un grief tiré de la violation de l'article 2.
74. À l'inverse, les sixième et septième requérants, qui sont respectivement le frère de la belle-mère du défunt et la compagne de son demi-frère, ne justifient pas de leur proximité avec Angelo Garand. La Cour relève en outre que des parents plus proches du défunt sont parties à la procédure devant elle (Belkıza Kaya et autres, précité, § 46). Dans ces conditions, la Cour considère que ces requérants ne peuvent se prétendre victimes au sens de l'article 34 et accueille l'exception préliminaire du Gouvernement sur ce point. Il s'ensuit que la requête est irrecevable ratione personae en ce qui concerne les sixième et septièmes requérants et que cette partie de la requête doit être rejetée en application de l'article 35 §§ 3, a) et 4 de la Convention.
75. Constatant que le reste de la requête n'est pas manifestement mal fondé ni irrecevable pour un autre motif visé à l'article 35 de la Convention, la Cour la déclare recevable pour le surplus.
B. Sur le fond
1. Thèses des parties
a) Les requérants
76. Premièrement, les requérants soutiennent que les tirs des opérateurs du GIGN n'étaient ni absolument nécessaires ni strictement proportionnés au but recherché.
77. Ils font valoir que la nécessité de mettre fin à l'évasion d'Angelo Garand n'était pas un but susceptible de justifier un tel recours à la force.
78. En ce qui concerne la nécessité d'assurer la défense de toute personne contre la violence illégale, ils font valoir qu'il n'est pas établi qu'Angelo Garand était armé d'un couteau au moment des faits. Contestant l'interprétation retenue par les juridictions internes, ils estiment que la présence de l'empreinte génétique d'Angelo Garand sur le manche du couteau retrouvé sur les lieux ne suffit pas à établir qu'il en a fait usage lors de l'intervention de l'antenne du GIGN. Ils soutiennent que les constatations effectuées sur les lieux ne sont pas probantes, dans la mesure où le corps a été déplacé par les secours après les tirs. Ils ajoutent que le médecin ayant constaté le décès aurait indiqué, lors d'un appel téléphonique au régulateur du SAMU, qu'Angelo n'était « pas armé » et qu'on lui avait demandé de faire preuve d'une « discrétion totale ». Ils soulignent enfin que B.D. a admis avoir fait feu sans avoir personnellement constaté que le défunt était armé.
79. En toute hypothèse, les requérant considèrent que ce recours à la force est disproportionné. Ils font valoir qu'Angelo Garand, qui n'avait jamais été condamné pour des faits de violence graves, était seul face à cinq hommes lourdement armés et porteurs d'un équipement de protection. Ils ajoutent enfin que les agents ont tiré à huit reprises, sans sommation préalable, et à courte distance, le défunt ayant été touché au thorax à cinq reprises.
80. Deuxièmement, ils considèrent que l'opération n'a pas été préparée et contrôlée de manière à minimiser le recours à la force meurtrière ou le risque de décès accidentel. Ils critiquent, d'une part, le caractère excessif des moyens mis en œuvre, et avancent, d'autre part, que les agents de l'antenne du GIGN ont délibérément fait le choix de donner l'assaut dans la remise où Angelo Garand était retranché, alors qu'il aurait été possible de négocier sa reddition.
b) Le Gouvernement
81. Le Gouvernement soutient que l'intervention des gendarmes visait à la fois à assurer la défense de la vie d'autrui et à faire cesser une évasion.
82. Il fait valoir que l'usage de la force était absolument nécessaire et strictement proportionné. Il rappelle que la réponse de l'antenne du GIGN a été graduée. Ses agents ont d'abord tenté d'appréhender physiquement le fugitif. Constatant qu'il était armé et menaçant, ils lui ont enjoint de lâcher son couteau. Deux militaires ont fait usage de leur pistolet à impulsion électrique, sans succès.
83. Il indique que deux autres gendarmes ont ouvert le feu en dernier recours, à un moment où Angelo Garand s'apprêtait à porter un coup de couteau à F.D. Il souligne qu'il convient de considérer le risque perçu par ces agents, qui ont tous deux considéré qu'un de leurs collègues était en danger de mort.
84. Il soutient par ailleurs que l'usage de la force était strictement proportionné. Il fait notamment observer que la configuration des lieux ne permettait pas aux cinq militaires présents dans la pièce de se retirer rapidement en toute sécurité.
2. Appréciation de la Cour
a) Principes généraux
85. Les exigences résultant de l'article 2 de la Convention en matière de recours à la force meurtrière ont été présentés dans les arrêts McCann et autres c. Royaume-Uni (27 septembre 1995, §§ 146-150 et 200, série A no 324), Natchova et autres c. Bulgarie ([GC], nos 43577/98 et 43579/98, §§ 93-97, CEDH 2005-VII) et Giuliani et Gaggio c. Italie ([GC], no 23458/02, §§ 174‑182, CEDH 2011 (extraits)), auxquels il est renvoyé.
86. La Cour rappelle en particulier que le recours à la force meurtrière par les forces de l'ordre peut se justifier dans certaines conditions. Cependant, tout usage de la force doit être rendu « absolument nécessaire », c'est-à-dire être strictement proportionné aux buts mentionnés au paragraphe 2 a), b) et c) de l'article 2 (McCann et autres, précité, §§ 148-149, Giuliani et Gaggio, précité, §§ 175-176, et Jaloud c. Pays-Bas [GC], no 47708/08, § 199, CEDH 2014).
87. L'usage de la force par des agents de l'État peut se justifier lorsqu'il se fonde sur une conviction honnête considérée, pour de bonnes raisons, comme valable à l'époque des événements mais qui se révèle ensuite erronée. Affirmer le contraire imposerait à l'État et à ses agents chargés de l'application des lois une charge irréaliste qui risquerait de s'exercer aux dépens de leur vie et de celle d'autrui (McCann et autres, précité, § 200, et Giuliani et Gaggio, précité, § 178), eu égard notamment au caractère imprévisible de la nature humaine (Perk et autres c. Turquie, no 50739/99, § 72, 28 mars 2006). À cette fin, la Cour doit vérifier le caractère subjectivement raisonnable de la conviction de l'auteur du recours à la force, en tenant pleinement compte des circonstances dans lesquelles les faits se sont déroulés (Armani Da Silva c. Royaume-Uni [GC], no 5878/08, §§ 244‑248, 30 mars 2016 et Chebab c. France, no 542/13, § 76, 23 mai 2019).
88. La Cour doit examiner de façon extrêmement attentive les allégations de violation de l'article 2, en prenant en considération non seulement les actes des agents de l'État ayant effectivement eu recours à la force, mais également l'ensemble des circonstances les ayant entourés, et notamment leur préparation et le contrôle exercé sur eux (McCann et autres, précité, § 150, Makaratzis c. Grèce [GC], no 50385/99, § 59, CEDH 2004-XI, et Giuliani et Gaggio, précité, § 176). À cet égard, il peut être utile de rechercher si l'opération des forces de l'ordre a été préparée et conduite avec le souci de minimiser autant que possible le recours à la force meurtrière ou les décès accidentels (Bubbins c. Royaume-Uni, no 50196/99, § 136, CEDH 2005-II (extraits), et Pârvu c. Roumanie, no 13326/18, § 75, 30 août 2022).
89. Pour l'appréciation des éléments de fait, la Cour se rallie au critère de la preuve « au-delà de tout doute raisonnable ». Une telle preuve peut résulter d'un faisceau d'indices, ou de présomptions non réfutées, suffisamment graves, précis et concordants. En outre, le comportement des parties lors de la recherche des preuves peut être pris en compte (Salman c. Turquie [GC], no 21986/93, § 100, CEDH 2000-VII, et Giuliani et Gaggio, précité, § 181). Pour un plus ample exposé des critères pertinents en la matière, la Cour renvoie aux arrêts Tanış et autres c. Turquie (no 65899/01, § 160, CEDH 2005-VIII) et Tagayeva et autres c. Russie (nos 26562/07 et 6 autres, § 586, 13 avril 2017).
90. Eu égard à la nature subsidiaire de son office, la Cour est consciente qu'elle doit se garder d'établir les faits à la manière d'une juridiction de première instance, à moins que cela ne soit rendu inévitable par les circonstances particulières de l'affaire dont elle est saisie (McKerr c. Royaume-Uni (déc.), no 28883/95, 4 avril 2000, et Mustafa Tunç et Fecire Tunç c. Turquie [GC], no 24014/05, § 182, 14 avril 2015). En principe, quand des procédures internes ont été menées, il n'appartient pas à la Cour de substituer sa propre version des faits à celle des autorités internes, qui doivent établir les faits sur la base des preuves recueillies par elles. Si leurs constatations ne lient pas la Cour – laquelle demeure libre de se livrer à sa propre évaluation à la lumière de l'ensemble des matériaux dont elle dispose –, elle ne s'écartera normalement des constatations factuelles des juridictions internes que si elle est en possession de données convaincantes à cet effet (Klaas c. Allemagne, 22 septembre 1993, § 29, série A no 269, Giuliani et Gaggio, précité, § 180, et Bouras c. France, no 31754/18, § 54, 19 mai 2022). La prise en compte par la Cour des éléments recueillis au cours de l'enquête conduite au niveau interne et des faits établis lors du procès devant le juge national dépendra dans une large mesure de la qualité du processus d'enquête interne, du caractère approfondi de celle-ci et de sa cohérence (Tagayeva et autres, précité, § 586).
b) Application en l'espèce
91. À titre liminaire, la Cour constate que les requérants ne contestent ni la qualité des investigations menées au sujet du décès d'Angelo Garand ni celle des procédures internes. Ils ne critiquent pas davantage le cadre juridique interne relatif à l'usage des armes à feu par les forces de l'ordre, qui n'autorise l'ouverture de feu qu'en cas d'absolue nécessité (paragraphe 65 ci‑dessus).
i. Sur l'établissement des faits
92. En ce qui concerne l'établissement des faits, la Cour relève que les investigations relatives au décès d'Angelo Garand ont été menées avec un soin tout particulier par les autorités internes. Le procureur de la République s'est immédiatement rendu sur les lieux et a rapidement diligenté une enquête en saisissant l'IGGN (paragraphe 28 ci-dessus). Les agents suspectés ont été placés en garde à vue quelques heures après les faits (paragraphe 29 ci‑dessus), cette mesure ayant eu pour effet de limiter significativement le risque de concertation. En outre, une information judiciaire a été ouverte et a été menée avec diligence. L'exhaustivité des investigations n'est pas contestée ; il a, en particulier, été fait droit à la demande d'acte des parties civiles relative à l'audition du docteur C. La motivation des décisions judiciaires relatives à la clôture de l'information témoigne enfin d'un examen approfondi et sérieux de l'ensemble des éléments de preuve recueillis et d'une prise en considération des observations des parties civiles (paragraphes 58 à 61 ci-dessus). Dans ces conditions, la Cour considère que les circonstances du décès d'Angelo Garand ont été établies au terme d'un processus d'enquête approfondi, dénué de toute lacune procédurale. Il lui reste à déterminer s'il existe une raison convaincante de s'écarter des constatations factuelles des juridictions internes.
93. Les juridictions internes ont tenu pour établi que les agents avaient d'abord enjoint à Angelo Garand de sortir de sa cachette et qu'ils avaient tenté de l'appréhender physiquement. Celui-ci s'est cependant débattu et a menacé les agents de l'antenne du GIGN avec un couteau. Deux d'entre eux ont alors tenté de le maîtriser en procédant à deux tirs au pistolet à impulsion électrique. Celui-ci a continué à se montrer menaçant et s'est précipité sur un agent, le couteau à la main. Deux agents ont alors ouvert le feu en tirant à huit reprises en direction du thorax d'Angelo Garand.
94. Les requérants contestent cette version des faits et soutiennent en substance qu'Angelo Garand a été abattu alors qu'il faisait face à cinq agents en équipement d'intervention et qu'il n'était pas armé. La Cour relève cependant que les déclarations des gendarmes ont été recueilles séparément, dans les conditions précitées (paragraphe 92 ci-dessus), et qu'elles sont concordantes. La lecture des procès-verbaux d'audition de ces agents tend par ailleurs à confirmer leur spontanéité. De plus, ces déclarations ont été corroborées par les investigations de police scientifique (autopsie, examens balistiques et examens génétiques mentionnés aux paragraphes 30 à 36) et par la reconstitution des faits (paragraphe 46 ci-dessus).
95. La Cour estime par ailleurs que les propos tenus par le docteur C. ne suffisent pas à remettre en cause cette appréciation des faits. En effet, il résulte des termes mêmes de la retranscription de ses échanges avec le régulateur du SAMU que celui-ci était en train de spéculer sur les raisons qui avaient pu amener les autorités à confier une enquête sur le décès d'Angelo Garand à un service d'enquête extérieur (paragraphe 52 ci-dessus). Qui plus est, celui-ci n'a pas assisté à la scène et n'a jamais indiqué avoir reçu de confidences de la part de qui ce que soit. Interrogé par le juge d'instruction en présence des parties civiles, le docteur C. a, en outre, expliqué que la situation était tout à fait inhabituelle pour lui et qu'il avait été invité à la discrétion au regard de la particulière tension suscitée par ce drame (paragraphes 57 et 61 ci-dessus).
96. Enfin, si B.D. a admis, dès sa première audition, qu'il n'avait pas vu le couteau brandi par Angelo Garand, il a constamment indiqué qu'il avait entendu l'avertissement des autres membres de son unité et qu'il avait constaté des mouvements de recul de leur part (paragraphes 41 et 54 ci‑dessus). Au vu de ces éléments, la Cour considère qu'elle ne dispose pas d'éléments de nature à la convaincre de s'écarter de l'appréciation factuelle des juridictions internes.
ii. Sur le but poursuivi
97. À l'instar des juridictions internes, la Cour décide d'examiner la proportionnalité du recours à la force à l'aune de l'objectif de « défense de toute personne contre la violence illégale » prévu à l'article 2 § 2, a).
iii. Sur l'absolue nécessité du recours à la force
98. La Cour souligne tout d'abord que les juridictions internes ont examiné la proportionnalité du recours à la force en recherchant si celui-ci était absolument nécessaire et en procédant à une analyse complète et minutieuse des éléments de preuve recueillis (Ghaoui c. France, no 41208/21, § 113, 16 janvier 2025).
99. Elle relève ensuite que l'incident est survenu dans une pièce exiguë (environ 20 m²), mal éclairée et très encombrée, où se trouvaient le défunt, ainsi que cinq agents lourdement équipés (paragraphes 16, 18 et 21 ci‑dessus). La situation a rapidement dégénéré, ce qui a laissé peu de temps aux agents pour réagir.
100. Elle observe en outre que les membres de l'antenne du GIGN avaient été informés qu'ils faisaient face à un individu dangereux, qui était susceptible d'être armé et sous l'emprise de stupéfiants.
101. Il résulte par ailleurs des déclarations d'A.B. et de B.D. qu'ils ont personnellement constaté, d'une part, qu'Angelo Garand était menaçant et déterminé et, d'autre part, que leurs collègues étaient acculés. Deux tirs de pistolet à impulsion électriques avaient été vains. Les juridictions internes, qui ont eu l'avantage de pouvoir entendre A.B. et B.D. et d'apprécier par elles-mêmes leur crédibilité, ont considéré que tous deux avaient agi alors qu'ils estimaient sincèrement que la vie de leur collègue était en jeu (paragraphes 59 et 61 ci-dessus). La Cour ne dispose pas d'élément permettant de remettre en cause l'appréciation, retenue par les juges internes, de la sincérité et l'honnêteté de cette conviction. Il est vrai que le nombre des tirs qui ont été effectués est élevé (huit). Pour autant, la Cour relève qu'il résulte des investigations et des constats effectués par les juridictions internes que ceux-ci ont principalement été réalisés par un seul tireur, dans des conditions particulièrement délicates, alors que celui-ci et ses collègues faisaient face à un danger leur apparaissant comme irrépressible. La Cour note en outre que les tirs, qui se sont poursuivis tant que perdurait la situation de danger, ont immédiatement cessé dès lors qu'Angelo Garand a arrêté sa progression (paragraphes 23 et 24 ci-dessus).
102. Dans ces conditions, la Cour considère que la conviction de ces deux agents était subjectivement raisonnable et que leur décision de faire usage de leurs armes de poing pouvait, dans les circonstances de l'espèce, quelles qu'en fussent les conséquences, passer pour justifiée et absolument nécessaire « pour assurer la défense de toute personne contre la violence illégale » au sens de l'article 2 § 2 a) de la Convention.
iv. Sur la préparation et le contrôle de l'opération
103. S'agissant de la préparation et du contrôle de l'opération, la Cour constate que l'interpellation d'Angelo Garand a été confiée à une unité d'intervention spécialement entraînée, habituée à gérer des situations périlleuses et complexes. Elle note que les agents sont intervenus en nombre suffisant, qu'ils étaient dotés d'un armement intermédiaire dont ils ont fait usage et qu'ils ont agi de façon coordonnée, sans rupture de la chaîne de commandement. Elle relève par ailleurs qu'Angelo Garand, alors en fuite, passait rarement deux nuits au même endroit, ce qui constituait une contrainte importante pour la préparation de l'intervention. Pour autant, il résulte des investigations internes qu'un plan d'intervention a été établi et mis en œuvre, sur la base des renseignements et des éléments cartographiques disponibles (paragraphe 13 ci-dessus). En outre, les informations fournies aux agents interpellateurs sur les antécédents, la dangerosité et les habitudes de consommation d'Angelo Garand étaient pertinentes et conformes aux renseignements réunis par les enquêteurs. Elles se sont d'ailleurs avérées exactes (paragraphes 5, 7, 8, 36, 37 et 45 ci-dessus).
104. Les requérants font valoir qu'il aurait été moins risqué de cerner la remise et de négocier la reddition d'Angelo Garand. À cet égard, la Cour rappelle qu'elle doit faire preuve de prudence quand elle réexamine les événements avec le bénéfice du recul (Bubbins, précité, § 147). Elle ne saurait, en réfléchissant dans la sérénité de ses délibérations, substituer sa propre appréciation de la situation à celle de l'agent qui a dû réagir dans le feu de l'action (ibidem, § 139, et Bouras, précité, § 61). Elle note qu'A.B. et F.D. ignoraient où l'intéressé était caché au moment d'entrer dans la remise. Au moment où les tirs mortels ont été effectués, A.B. et B.D. percevaient un danger immédiat pour la vie d'un de leurs collègues qu'une manœuvre de retrait n'était plus de nature à faire cesser.
105. Dans ces conditions, la Cour considère que le décès d'Angelo Garand n'est pas imputable à une quelconque défaillance dans la préparation ou dans le contrôle de l'opération d'interpellation.
v. Conclusion
106. Au vu de l'ensemble de ses éléments, la Cour conclut qu'il n'y a pas eu violation de l'article 2 de la Convention.
PAR CES MOTIFS, LA COUR, À L'UNANIMITÉ,
1. Dit que Francis Corset et Laura Flament ne peuvent se prétendre « victimes » au sens de l'article 34 de la Convention et déclare la requête irrecevable dans la partie les concernant ;
2. Déclare la requête recevable en ce qui concerne Maurice, Chantal, Aurélie, Vanessa et Sonny Garand ;
3. Dit qu'il n'y a pas eu violation de l'article 2 de la Convention.
Fait en français, puis communiqué par écrit le 6 mars 2025, en application de l'article 77 §§ 2 et 3 du règlement.
Victor Soloveytchik María Elósegui
Greffier Présidente
ANNEXE
Liste des requérants
Requête no 2474/21
No |
Prénom NOM |
Année de naissance |
Lieu de résidence |
Lien de parenté avec le défunt |
1. |
Maurice GARAND |
1959 |
Seur |
Père |
2. |
Chantal CORSET ép. GARAND |
1965 |
Seur |
Belle-mère |
3. |
Aurélie GARAND |
1987 |
Seur |
Demi-sœur |
4. |
Vanessa GARAND |
1990 |
Seur |
Demi-sœur |
5. |
Sonny GARAND |
1992 |
Seur |
Demi-frère |
6. |
Francis CORSET |
1966 |
Seur |
Oncle par alliance (frère de la 2e requérante) |
7. |
Laura FLAMENT |
1992 |
Seur |
Belle-sœur (compagne du 5e requérant) |